Dans son discours de bienvenue, la présidente du Projet Aladin, Leah Pisar, a rappelé aux participants au Dialogue de Tanger que « notre diversité est la raison même de notre présence ici, ainsi que la reconnaissance du fait qu’il y a bien plus de choses qui nous unissent que de choses qui nous séparent. »
Discours de la présidente du Projet Aladin, Leah Pisar – Cérémonie d’ouverture – 10 juin 2022
Cher ministre Bourita, cher ministre Moratinos, cher André Azoulay,
Excellences, chers amis,
C’est vraiment arrivé ! Nous sommes ici… moins d’un an après que Monsieur le ministre Nasser Bourita nous ait si gracieusement reçus, Abe Radkin et moi, à Rabat.
Ce fut une rencontre mémorable. La discussion a été passionnante et très animée.
Nous avons parlé du monde, de ses problèmes, et du besoin, en ces temps sombres, d’espoir, de dialogue et de lumière.
Nous avons parlé de mon amour pour le Maroc, de ma fascination pour ce pays, de sa riche histoire millénaire, de ses multiples facettes, de ses couleurs, ses sons et ses goûts délicieux, de la diversité de son relief… et de sa position géopolitique unique.
Et c’est ainsi qu’est née l’idée du Dialogue de Tanger. Un souhait de vous réunir – vous tous, qui venez de toutes les parties du monde, qui avez voyagé de près et de loin pour être ici, qui rassemblez tant de connaissances, tant de diversités et une richesse de perspectives.
Un souhait de se tourner vers l’avenir et de réfléchir à la manière dont nous pouvons forger un nouveau modèle des Lumières, un modèle des Lumières partagées – ensemble.
Monsieur le ministre Nasser Bourita, comment puis-je commencer à vous remercier de nous accueillir, ainsi que votre infatigable équipe qui a travaillé si dur, dans des circonstances internationales compliquées, pour réunir tout cela ?
La participation et le parrainage de Monsieur le ministre Miguel Angel Moratinos, ainsi que de l’Alliance des civilisations des Nations Unies, donnent à cette initiative une signification et une résonance particulières, tout comme le message du Secrétaire général António Guterres, qui nous a reçus si chaleureusement il y a quelques mois à New York.
Votre Excellence, je me dois de rendre hommage à votre ville mythique de Cordoue qui, de l’autre côté du détroit, se présente comme un écho historique et d’une beauté à couper le souffle, ce qui nous amène ici aujourd’hui.
Je suis tout simplement en admiration devant cette assemblée. Excellences, chers ministres et représentants provenant de tant d’endroits, votre présence ici aujourd’hui me donne des ailes.
Elle me fait croire que ce que nous essayons d’accomplir est réel, que cela peut arriver, que cela doit se produire. Je vous remercie, du fond du cœur, d’avoir pris le temps d’être ici malgré votre emploi du temps chargé.
Et c’est la preuve que vous partagez ma propre conviction que, même si nous avons des différences, notre diversité est la raison même de notre présence ici, tout comme la reconnaissance qu’il y a bien plus de choses qui nous unissent que de choses qui nous séparent.
Le Maroc occupe une place très spéciale dans mon cœur et, plus important encore, dans l’histoire et la mission du Projet Aladin.
Cher André Azoulay, notre dette de gratitude envers vous est immense. Vous avez joué un rôle essentiel depuis la création du Projet Aladin en 2009, avec le soutien de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, pour promouvoir le dialogue et le rapprochement interculturels à travers « la connaissance mutuelle et le respect de l’autre. » Nous sommes profondément honorés par votre présence ici aujourd’hui et par votre soutien indéfectible.
A titre personnel, je suis profondément reconnaissante pour votre amitié et vos conseils avisés. Vous m’avez encouragée à relever ce défi il y a quelques années, et vous ne cessez de me pousser à être audacieuse et à essayer de faire ce qui est juste.
Vous êtes ici aujourd’hui au nom du Roi.
En tant que fille d’un survivant d’Auschwitz, je voudrais humblement rendre hommage à Sa Majesté pour sa décision historique de faire enseigner l’histoire de l’Holocauste dans les écoles marocaines.
Ceci est si cher à la mission du Projet Aladin : un devoir d’enseigner les leçons de l’histoire comme un appel universel et contemporain à la vigilance.
Pour mieux comprendre, et donc mieux combattre les racines et les manifestations de haine et de violence qui agitent notre monde aujourd’hui ; pour avertir les jeunes générations de toutes les races, couleurs et croyances, et très directement ceux qui prient le même Dieu abrahamique, que le fanatisme et la violence qui infestent notre planète pourraient bien détruire le monde de nos enfants comme ils ont détruit celui de nos parents. À moins que nous ne FASSIONS quelque chose à ce sujet.
Je salue donc respectueusement Sa Majesté le Roi pour avoir eu le courage et la vision de montrer la voie. Et je prie pour que d’autres suivent son noble exemple.
Sa Majesté est le fier petit-fils du Roi Mohammed V, dont la bravoure et la force morale pendant la Seconde Guerre mondiale méritent notre respect éternel, et qui a été un phare de lumière, d’humanité et de droiture dans les temps les plus sombres. Que sa mémoire soit une bénédiction.
La lumière… Oui, la lumière est le leitmotiv de ce rassemblement. Vous la trouverez dans le ciel de Tanger pendant la journée, et de manière très puissante lorsque le soleil se couche et peint l’horizon avec les couleurs les plus éblouissantes.
Maintenant, laissez-moi conclure en partageant mon espoir pour ce rassemblement… et être un peu directive :
Chers amis, je souhaite que vous viviez cette expérience en toute liberté et informalité. Je souhaite un échange ouvert et vivant. Je veux que chacun d’entre vous parle, que chacun d’entre vous écoute, et je veux que tout le monde ici reparte avec de nouvelles perspectives, ayant ouvert les yeux sur de nouveaux points de vue et de nouvelles idées.
Je veux que vous fassiez de votre mieux pour vous débarrasser de vos idées préconçues.
Et si, comme cela arrive souvent, vous n’êtes pas d’accord avec ce que dit un autre participant, je vous demande de garder à l’esprit l’un de mes principes directeurs : Si je veux que vous m’écoutiez, alors je dois vous écouter. Le respect mutuel est une condition absolue pour votre présence ici.
Je dois réitérer un point que je juge essentiel : Nous ne sommes pas ici pour être d’accord sur tout. Nous sommes ici précisément pour apprendre à nous connaître, pour rencontrer des femmes et des hommes que nous n’aurions jamais croisés autrement.
En fait, si nous nous mettons d’accord sur tout au cours des deux prochains jours, alors je ne considérerai pas que nous aurons pleinement accompli notre mission. Au contraire, nous sommes ici pour converser et pour essayer de forger un chemin vers l’avant – un chemin magnifiquement complexe et sinueux vers la lumière.
Le titre de cette réunion peut inclure le mot « Dialogue », mais nous devons faire plus ici que simplement parler.
Nos paroles doivent être suivies d’actes.
Mesdames et Messieurs, il ne s’agit pas d’une simple conférence. C’est un appel à l’action.
Maintenant, mettons-nous au travail.